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7 décembre 2020

D'un continent à l'autre, par Maylou et Océane

 

“Oh vous m’embrayez !” nous dit Maxime. Eh oui on embraye les moteurs pour quitter la baie de Mindelo. Avant de partir pour la traversée, on fait une halte à Santa Lucia, cette belle île naturelle qui nous a bien plu à notre arrivée au Cap-Vert. On veut la montrer à Christophe, profiter d’une dernière plongée et quitter en douceur cet archipel. C’est le jeudi 19 que l’on met le cap sur la Guyane. Chaque membre de l’équipage écrit son pronostic d’arrivée. Ce jeu que nous faisons pour chaque navigation consiste à estimer la vitesse moyenne à laquelle nous avancerons grâce au vent. Cela permet, avec le nombre de milles nautiques à parcourir, de calculer le jour d’arrivée aux îles du Salut. À cela nous ajoutons le pronostic “poissons” : combien de poissons seront pêchés durant cette navigation ? Eh bien sachez que nous aurons pêché 2 gros poissons, un thazard bois et un thazard blanc long d’1 mètre 20. L’excitation sur le pont, la décapitation à la jupe et la dégustation dans nos assiettes. On ne peut pas faire plus frais !

Concernant les pronostics, c’est Maylou qui a gagné. Nous avons réalisé 1880 milles nautiques en 12 jours avec une moyenne de 6 nœuds.

Grâce à un vent portant nous avons navigué une bonne partie du temps avec les voiles en ciseaux. Voile d’avant d’un côté, grand voile de l’autre, c’est rare pour un catamaran de naviguer de cette manière. En tous cas pour nous c’est super agréable, d’autant plus pour ceux qui ont le mal de mer. Que ça soit les voiles en ciseaux ou une paire de ciseaux, les deux sont à notre avantage. Car croyez-le, en 12 jours de navigation, 3 de nos matelots ont grandi d’un an ! Et qui dit anniversaire dit cadeaux. Les cadeaux sur Grandeur Nature sont toujours fait mains, alors, de l’aiguille à coudre au marteau, le matériel de bricolage aura bien servi.

À l’aube du 21 novembre, des dauphins nous rendent visite pour fêter les 14 ans de Maxou. Taquin, un sourire en coin, il nous donne tout plein de câlins. Un thazard bois et 2 beaux gâteaux seront ses premiers cadeaux. En fin de journée, Maxime parcourt le bateau durant d’une chasse au trésor pour découvrir des bouts de canne à sucre. Ce sont nos bonbons à bord.


 

22 novembre, c’est Océ qui fête ses 10 ans de plus que Max. Et l’anniv d’Océane en plein Océan c’est quand même pas courant ! Elle a tout plein de belles attentions. Et comme la veille, ce sont Théo et Kylian qui se démènent pour cuisiner de bons gâteaux.

29 novembre, Kylian sort de la coque et tout le monde donne une voix de stentor pour une chanson personnalisée sur l’air de Santiano. On n’a pas inventé le fil à couper le beurre mais on a réussi à l’émouvoir. Le moment rigolade fut durant le goûter où nous l’avons accueilli sur le pont tous déguisés en pirate.

 


Mises à part ces journées exceptionnelles, le quotidien en navigation est bien rythmé. Déjà le soleil nous impose les horaires de coucher et celles de lever. L’horaire n’est pas tellement important car au fur et à mesure que nous avancçons, nous reculons l’heure. Et selon les personnes qui s’en chargent, on gagne une heure, soit durant le travail de tête, soit avant de manger car il y a du retard en cuisine, ou encore pendant la nuit pour avoir plus de sommeil. Mais ce n’est jamais au 4 heures pour goûter deux fois…

Le travail de tête est très aléatoire. Motivé ou ramollo, parfois esquivé, parfois intéressant, ce temps-là est bien personnalisé selon les intérêts et les capacités de chacun. Certains organisent des cours collectifs ou des exposés pour le groupe. Christophe et Maylou ont présenté l’histoire de la Guyane et de ses nombreux bagnes, tandis que Tanaé et Ben ont parlé des animaux vus et observés lors de leur dernier passage en Guyane, au voyage précédent.

En début d’après-midi c’est souvent le temps baignade, on affale la voile d’avant pour ralentir le bateau et on peut même sauter de l’étrave pour nous accrocher sous le bateau ou à l’arrière. La vitesse et la houle fluctuent. Par contre la joie dans ces moments-là est toujours présente, même Morgane a sauté de l’avant. On mélange le jeu à l’hygiène, se savonner ou sauter dans tous les cas ça mousse à l’arrière.

S’ensuit le point journalier, effectué par le navigateur quotidien qui comptabilise les nombre de milles nautiques ainsi que la vitesse moyenne parcourus en 24 heures. Autour d’un goûter, on écoute Christophe qui nous lit un livre sur les aventures d’un garçon orphelin. Une histoire bien touchante sur la déporatation des enfants anglais dans les années 1945. Entre le goûter et le repas du soir c’est souvent un temps libre, paisible, où des parties de jeux de société s’enchaînent, type échecs, backgammon, Main verte… Puis c’est généralement Maxime qui est pressé de lire les ¼ de nuit, au point de les connaître par coeur. Ainsi il nous annonce à quel moment de la nuit nous allons veiller à l’avancée, la sécurité de l’équipage et du bateau.

C’est au cours de ces journées qui se ressemblent que nous avons des surprises. On se souvient tout particulièrement de ce soir où des dauphins enjoués nous ont encerclés. C’était furtif et magique comme si nous passions à travers une représentation. Parfois ce sont des phrases entendues qui pimentent notre quotidien, du style Ewen qui crie : “Eh ben j’peux vous dire qu’une orange pourrie ça flotte!”.

Enfin, à la tombée de la nuit, nous apercevons une terre à l’horizon: les 3 îles du Salut. Ce sont d’ anciens bagnes, les constructions qui y demeurent nous font sentir toute l’histoire et les souvenirs qu’il reste de ces prisonniers français (jusqu’en 1945). Nous sommes restés deux jours au mouillage pour nous mettre à flot et visiter l’île Royale. C’était bon et doux de retrouver la terre. Nous avons rencontré des singes et des agoutis, la sociabilité des singes était impressionnante, d’ailleurs c’est une belle transition pour se ré-ouvrir vers le monde extérieur, car dans notre bulle, en plein océan, nous avons tendance à en oublier le reste du monde. Nos découvertes culinaires de ces îles (cocos et amandes) nous ont bien régalés, tout de même généreux nous avons partagé avec les singes. Sydney et Maylou gardent bien en tête leur gourmandise avec les cocos germées et les manques pas mûres. Il faut quand même que l’on vous parle de notre première arrivée sur ces îles. De nuit, après 12 jours de traversée, étonnamment nous arrivons ½ heure avant le lancement d’une fusée. Le centre spatial se trouve sur la côte guyanaise, ainsi les îles du Salut sont interdites d’accès car il peut y avoir des risques. Nous venions de lâcher l’ancre et d’éteindre les moteurs quand des gendarmes tout affolés nous demandent de quitter les lieux sur le champ. Séb, tout tranquille, leur demande: “Euh...on est vraiment obligés ?” pour essayer de négocier. On rallume les moteurs et on se dirige vers Kourou avec comme attraction le décollage d’une fusée. C’était tellement inédit et grandiose !

À présent nous sommes au mouillage à Saint-Laurent-du-Maroni, où nous faisons escale pour le mois de décembre. Beaucoup d’activités et de rencontres nous attendent, Lola nous a rejoints. Nous avons troqué l’eau bleue salée contre de l’eau douce et marron.

Maylou et Océane pour l’équipage.

 

(Les photos arriveront plus tard le scribe débordé!)

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