« Nouvelles du
Banc d’Argent 2, le retour! »
Le 26 Mars 2019
Ici, à bord de
l’Agressor II, on aime pas trop ce catamaran blanc qui vient sur le Banc
d’Argent en même temps que nous pendant la saison des baleines.
Déjà, il ne sont pas la pour le business, ils ont
la prétention de venir rencontrer les baleines dans un but éducatif !
Alors quand on les a vu partir la dernière fois, on
a espéré très fort que c’était pour de bon. Malheureusement, le cousin d’un des
membres de l’équipage qui fait du « whale watching » à Samana nous a
raconté ce qu’ils ont fait là bas.
Déjà, ils ont refait des courses et des pleins
d’eau. Et en faisant travailler les adolescents du bord, ces gens n’ont aucun
sens de la clientèle ! A moins que ça ne soit pas des clients à bord, mais
dans ce cas on ne voit pas trop pourquoi ils s’embêteraient à naviguer…
Le cousin les a vu se gaver sans vergogne de yaourt
à boire, d’ananas et d’empanadas. De grandes salades de produits frais, et même
des « batidos » ces jus de fruits mixés avec glace et lait concentré.
Pendant toute une journée ils sont restés à bord à
discuter tout ensemble. Apparemment ils ont fait un genre de bilan des
relations entre eux, et à la suite de ça, l’un d’entre eux (le petit blond
musclé) s’en est allé, sûrement vexé de ce que le autres lui ont dit !
Mais en fait, il a été remplacé tout de suite par
une fille un peu pâlotte à l’arrivée, on aurait dit une de nos touristes !
C’est comique de la voir si blanche au milieu de tous ces gens bronzés.
Bien vite, on les a vu revenir un matin. Une voile
blanche a l’horizon, et hop ! Quelques heures plus tard ils étaient là,
accrochés à leur pauvre bouées de miséreux, en plein devant nous, nous cachant
le lever du soleil.
Heureusement, à force de leur tourner autour avec nos
annexes, ils s’en vont presque tous les jours naviguer loin sur le banc, bon
débarras !
Les revoilà de nouveau, des
amis de longue date. Plus de vingt ans qu’ils viennent avec ce petit voilier.
Y’en a même un ça fait plus de 30 ans que je vois sa tronche ! J’ai
l’impression d’être un peu le papi de cette bande, ils viennent me voir une
fois qu’ils n’ont rien de mieux a faire, une fois les cours et le travail sur
le bateau fini.
Je les vois évoluer, plonger de plus en plus
profond, faire de plus grandes apnées. Ils arpentent chacune de mes parois et
découvrent toutes les créatures qui me hantent. Des raies léopards aux
poissons-coffres juvéniles en passant par le balaou, le poisson perroquet, le
poisson trompette, la langouste brésilienne sans oublier le fameux barracuda.
Ils me font souvent de faux espoirs quand ils
viennent vers moi avec leurs kayaks. Avant je me faisais toujours avoir mais
maintenant je sais que c’est pour aller voir la barrière de corail qu’ils se
donnent autant de mal à ramer.
Je ne sais pas ce qu’ils lui trouvent à cette vieille
garce. Elle est juste bonne à faire pousser du corail de feu. Toutes ses
patates se ressemblent, presque tout son corail est mort, il y a les mêmes
tunnels partout et plein d’effrayants requins-citrons. En plus de ça c’est à
cause d’elle que je me suis échoué il y a de longues années de ça.
J’ai envie de leur crier « youhou ! Je
suis là moi, et toute ma cloison sud est recouverte de coraux bien
vivants. » Mais ils ne connaissent pas le langage des vieilles épaves et
je reste muet face a leur oreilles de simples humains. J’avoue que j’ai peur de
disparaître, de ne plus exister, c’est pour ça que je m’efforce de garder une
infime partie de moi à la surface.
J’ai résisté au dernier ouragan mais j’ai peur le
prochain me fasse sombrer à tout jamais. Heureusement qu’ils sont là pour me
rappeler que j’existe. Durant leur plongée de nuit à la pleine lune, c’est moi
qu’ils sont venus voir !
Ils ont nagé dans mes entrailles, ils ont fait fuir
les poissons qui me nettoyaient les os et ils m’ont donné un peu de leur
énergie de vivre.
Pépé Popol
Moi avec mon baleineau, je les vois tous les jours
ces gens du gros bateau blanc qui viennent nous rendre visite quand ils nous
aperçoivent pas loin. Mais dès fois, on a pas très envie, alors on s’éloigne
pour être tranquille.
Les baleineaux les aiment beaucoup, alors quand
même souvent on les laisse venir ou même on va vers eux. L’autre jour, mon
petit a passé un bon moment à sauter juste à côté d’eux et il a même voulu leur
rendre une petite visite nocturne voir si ils dorment comme nous …
On s’est tellement rapprochés qu’on aurait pu les
toucher !
Mon escorte m’a d’ailleurs raconté qu’une de ses
collègues s’est carrément pris leur étrave, ça a du leur faire peur, ils sont
si petits. Ca a fait trembler le bateau, ils ont du se tenir pour ne pas tomber
sur son dos. Heureusement, plus de peur que de mal.
Aujourd’hui, ils ne sont plus là, ils sont partis
dans le mauvais temps, je ne sais même pas s’ils m’ont vu claquer de la
pectorale pour leur dire au revoir.
Ils vont surement revenir dans quelques jours, ça
ne me dérange pas, ils sont moins bruyants que les 3 autres avec leurs
moteurs !
Et puis mon petit voudrait les revoir une dernière
fois avant la migration.
Ma cousine de Samana m’a chanté qu’elle les a vu
arriver dans la baie, ils ont mis plus de temps que la dernière fois, c’est
normal aussi, s’ils se déplaçaient sous l’eau comme tout le monde le vent ne
les aurait pas embêté !
Mme Jubarte
Xan, Maya et Timothée.
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