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26 janvier 2023

La traversée de l'Atlantique : Cap-Vert/Fernando du 18 au 25/11

Le 18/11/2022. « Yawenn a vomi sa banane » par Philippe Katerine. Ou « va te voir dans le four ». 

Premier jour de navigation.


Ce jour-là, j’étais aussi de cuisine avec Yawenn, mais il était malade, il a vomi toute la journée et il a fini au lit vers 17 heures après avoir mangé une banane d’où le titre.


Ce jour-là, une bonne partie de l’équipage, dont Ismaël, a ressenti la fatigue des derniers jours d’escale et de la préparation de la traversée, conjuguée aux mouvements désordonnés de la houle.

Ce jour-là, nous nous sommes réunis entre grands pour défaire des nœuds, Kathleen (alias Vanessa) voulait que je raconte ça en mode télé-réalité mais moi (alias Dylan) j’avais grave la flemme.

Ce jour-là, Kathleen a coupé les cheveux de Mathys dans le filet avant et quand il a demandé ce que cela donnait la phrase : « Va te voir dans le four » a été prononcée.


Ce jour-là, nous avons parcouru 185 milles nautiques en 24 heures et tout l’équipage a fait un grand nettoyage du pont à l’eau de mer, avec des brosses, pour faire partir la crasse de la ville.

Ce jour-là, les parties d’Awalé se sont enchaînées sur le pont, ainsi que les concerts avec guitares et chants.

Ce jour-là, des baleines ont soufflé derrière nous et montré leurs caudales de rorquals tropicaux.

Ce jour-là, j’étais content d’être là et de me dire qu’on était partis pour une nouvelle traversée vers cette île de Fernando que j’adore.Cette nuit-là, le 18, mathématiquement je n’ai pas fait de quart de nuit, puisque j’étais de premier quart le 17 et de dernier quart le 19 (ça c’est pour les matheux).Publié le 26/Ce jour-là, on a surfé sur les vagues, nous avons quitté les eaux cap-verdiennes et dépassé les dernières îles, sans les voir.

Ce jour-là, j’ai pensé à Félix, à Lila, à Véro, aux autres membres de l’équipe, à la famille ROUX-SIRE et à Benjamin.

Ce jour-là était un jour parmi d’autres sur Grandeur Nature. 

Christophe


Le 19/11/22. « Étoiles doubles »


Ce matin, c’est lecture du livre sur l’univers. Anouk est à la barre et je m’installe à côté d’elle avec Yawenn pour lire à voix haute. Plus tard, Chad rejoindra l’équipe des petits astronomes en herbe que nous sommes. Nous abordons le chapitre sur les étoiles doubles. Elles naissent à partir du même nuage de gaz et de poussière. Elles peuvent être deux, trois, quatre et même plus à naître en même temps. Une fois nées, les étoiles doubles passent leur vie à tourner l’une autour de l’autre. Elles dansent en cadence dans un mouvement infini, et quand l’une passe devant l’autre elle cache sa lumière au passage. Vu qu’à ce moment-là sa luminosité chute d’un seul coup, nous, de loin, on a l’impression que ça clignote.

Un beau jour, quand la plus grande a perdu toutes ses réserves d’énergie, elle commence à venir arracher la sienne à sa compagne. Elle en amasse tellement qu’elle déborde, sa surface explose brusquement. Elle s’illumine alors violemment pendant plusieurs heures, c’est ce que l’on appelle une Nova. Après la crise, son éclat diminue peu à peu et tout redevient comme avant. Et quand, c’est au tour de la seconde étoile, ça recommence et ainsi de suite.


Ce passage m’a passionnée parce que je trouve qu’il illustre bien ce que nous pouvons vivre dans les relations. C’est un peu comme une valse sur la musique de la vie. On s’attire et on se repousse, on suit le rythme de nos émois. Parfois, comme la grande étoile, on prend beaucoup de place dans la relation, tellement de place qu’on aspire l’énergie de l’autre. De l’autre dans toute sa beauté d’étoile, dans toute sa lumière. On l’aspire tellement fort qu’on finit par exploser. On nie, on pleure, on crie, on est tout rouge à l’intérieur. Puis le silence se fait, le calme revient et on peut s’écouter, se rejoindre. Reprendre la danse où on l’avait laissée. On a appris de nouveaux pas. On sent mieux le tempo de l’autre, celui qu’il a dans la tête et dans le cœur. On lui offre, dans cette valse, une place pour qu’il nous montre à quelle fréquence il bat.

Kathleen


Le 20/11/2022. « T’as un grain toi ! »


Ça fait quelques jours qu’on a quitté Mindelo et, bien installés dans nos alizés, on voit passer des petits cumulus. On les observe, on en parle, certains commencent à dire que « c’est lui, là, qui nous fait du vent » en montrant un petit cumulus humilis ou un rondouillet mediocris.

Du coup, on en a parlé de ces fameux grains. Ce sont des nuages cumuliformes qui influencent le vent en surface. Ils se déplacent avec un vent plus en altitude, donc souvent, ils viennent de la droite (dans l’hémisphère nord) quand on regarde face au vent, mais parfois, ils font juste n’importe quoi.

Soit, ils se chargent et font comme quelqu’un qui aspire l’air vers le haut, soit ils se déchargent avec la pluie et font comme s’ils soufflaient de l’air froid vers la surface de la mer. Ça, c’est souvent quand ils sont un peu gros, genre congestus.

Niveau ressenti, du coup, on a un courant d’air froid, une variation de direction et de force du vent et de la pluie.

Et puisque, la pluie, on ne l’a pas vue tant que ça depuis le début, ça fait longtemps, alors ça change et ça donne ça dans nos impressions :

C’est Anouk et Kathleen qui ont eu le premier en début de nuit. Je sors de ma vaisselle et entends Anouk dire : « Ouh ! Il se met à faire froid d’un coup. »

Je demande : - « Le vent a tourné ? »

- « Non… Ah ! Si ! » répond kath. « Ça y est, on a pris 10-15° ! »

Isaac dira : « C’est marrant, on est passés de la théorie à la pratique. »

Alors il y a les enthousiastes genre Kath : « Eh, mais il faut en profiter et prendre des douches ! Ouvrez la glacière, on la remplit d’eau douce ! » Elle chante la chanson de la pluie de Bambi et avec Anouk, elles virevoltent en réglages de voile tout leur quart.

Ou bien Matis-Kirikou qui fait semblant de « Oh non, pas la pluie... » puis une fois dans le grain : « Wouhou ! On dirait que je fais un truc héroïque ! Je protège les coéquipiers de la tempête ! »


Et puis il y a ceux qui ont l’air de ne pas trop aimer ça. Christophe dit : « C’est humide… enfin, on était contents de laisser un ciel dégagé pour les suivants. »

Ou bien Mathys-Morgan qui, descendu quand il ne pleuvait pas encore, dit : « Quand je suis remonté, c’était la grosse pluie, je suis resté faire un point. » pendant que Chad : « On s’est fait mouiller comme des fous ! On a trempé nos cirés en deux minutes et jusqu’aux os même ! »

Et puis Yawenn, le Breton habitué : « Boh, on est juste sous la pluie quoi... »


Cette première nuit de pluie a donc amené des discussions sur la Bretagne où Isma a vu son premier « mur de pluie » à Erquy et sur cette drôle de ZIC (Zone Intertropicale de Convergence) où finissent par s’entasser les grains en bout de course.

On parle de la malédiction d’Isma qui a toujours de la pluie dans ses quarts et du pouvoir de Christophe qui repousse les grains par la force de l’esprit.

Elora.   

  


Le 21/11/2022. « Entre zic et zic, on traverse l’atlantique »


Petite pensée pour Seb ce matin, qui nous fait notre routage et qui tous les deux jours nous envoie des petits messages. « Eh, aujourd’hui vous êtes dans la zic les amis ! »

Zic : la Zone Intertropicale de Convergence.  Qu’on reçoit par téléphone satellite. De grain en grain, pas un quart sans pluie cette nuit : Kath, Anouk et Chad ; Mathys et Isma ; Christophe, Isaac et Matis et enfin Elora et Yawenn. Chaque fois le constat est le même : il pleut, ça mouille. La journée c’est pareil, l’énorme amas des jolis petits cumulus humilis de tout l’Atlantique Est s’est entassé ici, au 3 degré Nord.

Hier Elora a eu du flair et nous a fait un cours sur les grains, avec travaux pratiques aujourd’hui même : le vent qui forcit de manière spectaculaire, une vague d’air froid, une grosse masse sombre, un gros nuage parfois orageux, parfois pluvieux, faisant un peu ce qu’il veut.



Autant d’indices qui ne trompent pas : des grains ! Et ce, un peu partout autour de nous.

Pas de doute, la Zic est sur nous. Alors on s’équipe de notre bon vieux Guy Cotten, ou bien le maillot de bain pour d’autres.

Tout le monde est paré pour braver cette quatrième journée en traversée. La mer est agitée, la houle varie dans tous les sens, tantôt formée, tantôt croisée et parfois toute plate. Je profite des quelques accalmies pour sortir mes jumelles.

Ça faisait longtemps que je n’avais pas pris le temps de regarder les oiseaux, sortir mes guides, bosser les critères d’identification, d’âge…chez les Pélagiques.




Les petits bouts de rochers St-Pierre et St-Paul ne sont pas loin, l’Équateur approche. On sent que les concentrations d’oiseaux se font de plus en plus fréquentes… Dans les pêcheries, les espèces tropicales se font de plus en plus fréquentes : Fous à pieds rouges, sternes fuligineuses, noddis bruns, océanites frégates…Ces évolutions de cortèges, uniques témoins de notre avancée vers le Sud... J’aime observer les ballets et les piqués de ces virtuoses du vol à voile qui nous inspirent depuis des millénaires et qui sont à l’origine de tous nos voiliers et des avions.

C’est peut-être finalement ce qui m’attire le plus dans la voile : avancer avec le vent, au rythme des éléments, comme les oiseaux. C’est décidé, quand je rentre, je me mets au parapente.  Ismael.                                                                                                                                                               

                                                         

Le 22/11/2022. « Les fous et les adultes »


Un lever tranquille mais toujours en navigation ; l’heure du repas arrive et on observe les oiseaux qui essayent d’attraper les poissons volants. Les jeunes fous masqués ne sont pas expérimentés mais les adultes y arrivent au bout de la vingtième fois. Petite session baignade pour Grandeur Nature et l’équipage retrouve le sourire car on attendait tous ce moment. 




Ismaël me montre comment bien plonger et j’y arrive avec trois essais.  Après cela Christophe nous lit « Bahia », un livre sur le brésil où ça parle de pauvreté, j’aime bien ce livre. Ça commence à mouiller et tout l’équipage se met en ciré, l’eau claque contre les étraves et vient nous fouetter. On réveille Christophe qui nous aide à prendre un ris et nous allons nous coucher.

Matis



Le 23/11/2022. « Passage de l’équateur »



Ça y est nous sommes à 120 Milles de la ligne 0, vous me demanderez ce que cela fait de la passer mais bon, je vous raconterai à la fin du texte. Ce matin je suis de carré tribord avec Elora et Isaac. Après un coup de ménage, je me lance dans le rangement de ma cabine, soulever mon matelas, etc…


Après c’est l’heure du travail de tête ; je me lance dans l’écriture de texte car j’ai une inspiration de ouf !!! Cela me fait plaisir.  Ensuite après un repas de polenta, je me lance dans 1h de barre et à ce moment-là je me dis : « Mais pourquoi ne pas faire un gâteau au chocolat ? ». Je propose à Kath mais elle a des choses à faire. Isaac est chaud de le faire, alors go, il lance la pâte, mais avant la dégustation un grain-douche :  c’est un nouveau concept, tous à poil et on va dehors.  Enfin, pas vraiment à poil, hein.

Après la dégustation de notre brownie, Chris nous lit un chapitre du « livre co », ensuite moi je prends une douche à la jupe. Enfin, viennent les quarts, moi je suis avec Kat durant ces 3h. Nous parlons de tout et n’importe quoi. Je réveille le 2ème quart en disant bien de venir me réveiller pour le passage de l’Équateur. Chad vient me réveiller à 2h10, il reste 10 Milles avant le passage 10/9/8/7/6/5/4/3/2//1 ! « ON A PASSÉ L’ÉQUATEUR ! » Je vais vous dire ce que ça fait : c’est comme réaliser un rêve. Maintenant 2ème rêve : aller à New York avec ma tante et ma cousine, dédicace à toi d’ailleurs, et voilà c’est la fin, bises.

Mathys Mooggy/yk_noupix


Le 24/11/2022 « Du repas… au seau »


Ce matin, je n’ai pas trop envie de sortir la tête de mon lit, car une autre journée de mal de mer, ça ne m’attire pas trop. Mais bon, faut se forcer ! Alors, je sors la tête de mon oreiller, enfile mes habits et enfin je quitte la coque bâbord. Isaac est de petit-déj, il nous a préparé un super porridge ! Après le petit-déj, j’apprends que je suis de cuisine avec Elora. Aïe ! Mon ventre ne va pas aimer ! Mais bon, c’est le jeu ma pauvre Lucette ! Après avoir coupé des légumes et dégueulé dans un seau mon petit-déj, le repas est enfin prêt ! (patates, mafé et tartines de poivron). 


Par la suite, la vaisselle : mon ventre n’a vraiment pas aimé ce moment-là ! Heureusement qu’Elora était là ! Elle lavait la vaisselle et moi je la séchais à l’extérieur. Ensuite je vais faire une petite sieste, rapidement interrompue par Matis (Kirikou) et Mathys (Morgan). Après une petite douche à la jupe, on attaque mon contrat, puis l’heure du goûter est arrivée. Au menu, noix de coco et citronnade ! Enfin vient la fin de la journée. Je vais me coucher après avoir vomi mon repas…Yawenn Leroy  




Le 25/11/22. « DEUX MOI »


Aujourd’hui c’est assez spécial car on est le 25 et c’est jour que je dois raconter sauf que l’âme pleine d’inspiration j’ai écrit un texte que vous allez lire. Le texte est signé Malo car c’est mon nom de scène.

Deux moi - par Malo :

Depuis 2 mois ma vie a complètement changé,

J’embarque à bord d’un projet en quête de liberté.

Mes problèmes sont sortis du terrain, d’autres sont entrés.

Certains peuvent être réglés, d’autre me font sentir que,

Mes voiles hissées, je n’avance même pas à moitié.

Mais j’oublie tout ça en plongeant dans chaque grosse vague.

Sécher les cours à p’t être été ma meilleure connerie

Les conséquences d’mes actes au final sont magiques.

Des plages, balades ou nav’ presque toutes idylliques.

En partant de Sète j’savais qu’ j’allais jamais revenir.

Enfin l’autre moi n’allait jamais pouvoir s’en sortir.

Tant de nouvelles découvertes j’pourrais faire une liste…

D’abord y’a Gaël Faye cet artiste dont j’suis fanatique

Ces couplets, ces lignes m’emmènent dans un monde utopique.

Ensuite y’a les quarts, les nav’ sans aucun moment triste

Là où corps et esprit dansent ensemble sur la même piste.

Ensuite y’a les moments sombres que l’on n’éclaire pas
Donc ce n’est pas ici que j’vais vous en faire part.

Aujourd’hui sonne la fin d’la nav’, on est arrivés.

Brésil nous ouvre ses portes on va p’t être y accéder.

Mais à mes camarades ce sera d’vous raconter…

Chad/Malo




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