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27 avril 2015

Bienvenidos a Cuba... Par Aude et Moussa


Le 23 Avril – Depuis Cuba, Puerto de Vita, Province de Holguin.
Coucou tous !
Nous sommes restés cinq jours à Luperon, en République Dominicaine. Le deuxième jour a été marqué par le départ de Marec, notre psychologue, et d’Elo, présente sur le bateau depuis la Guyane en décembre. Tout l’équipage la remercie pour son énergie, pour tous les moments collectifs dont elle a été à l’origine… Merci Elo !
Nos vemos en julio ! Nous disons aussi au revoir à Marec. Tout en prenant la température de cette expédition, il a organisé des groupes de parole avec l’équipage, avec les adultes. Il a aussi vu les jeunes en entretien afin de faire un bilan après ces six mois de voyage et commencer à réfléchir avec eux sur leur projet(s) au retour.
Ces au revoir faits, nous nous tournons vers la prochaine escale : Cuba !
Préparatifs habituels : courses, pleins d’eau… Grosses courses cette fois car il est probable que nous ne trouverons rien à Cuba et comme après nous traverserons les Bahamas, il nous faut de quoi tenir cinq semaines !
La préparation de cette escale, c’est aussi la préparation des randos : nous cherchons dans le journal de bord de la dernière expédition des informations sur Cuba. Des envies commencent à se dessiner : « J’aimerais aller dans la Sierra Maestra », « j’aimerais bien rencontrer Elio le pêcheur, l’ami de Christophe » etc.
C’est aussi l’occasion de se questionner sur ce pays qui nous intrigue tous un peu. On échange, on lit des bouquins pour en savoir plus sur l’histoire et la culture de cette île. « Professor » Michel nous fait même un petit goûter-philo sur le communisme !

Le dernier jour, pendant que Moussa, Anaëlle, Christophe, Hélène et Kaïs font les grosses courses ; Michel, Aude, Dayan, Jade et Philémon partent visiter l’atelier de construction de bateaux de Luc, un ami de GN qui vit à Lupéron. Super accueil : on est tous bien intéressés, les jeunes ont pleins de questions,  Luc est très avenant et bon pédagogue… Bref, chouette moment. On assiste même au démoulage (et donc à la naissance) d’un bateau !
S’ensuivent deux jours de navigation sous un soleil de plomb, au bon plein, avec huit nœuds de moyenne. On barre, on joue, on lit, on fait un peu d’espagnol, on cale une séance d’impro théâtrale… Bref, une nav’ très tranquille.
Arrivée dans la baie de Vita à Cuba la 16 avril à l’aube. Un médecin monte à bord pour voir si nous sommes en bonne santé : bonne nouvelle, tout va bien ! Contrôle du bateau, des passeports. Ça y est, nous avons l’autorisation de mouiller.
Avant la première rando, on se pose 24 heures. Christophe et Hélène vont à la ville la plus proche, Guardalavaca, pour retirer de l’argent. On fait des lessives, on nettoie le pont. Aude retrouve par hasard Vianney, son voisin d’adolescence en Bretagne, qui voyage depuis huit mois avec son amie sur leur voilier. Ils viennent d’arriver à Vita, partageront les deux repas de cette journée avec nous et feront visiter aux jeunes leur voilier.
Arrive enfin l’heure de notre première rando, d’une durée de cinq jours.
Anaëlle, Moussa et Aude partiront dans la région de Banes, sur la côte Nord - Est de la province d’Holguin.
Hélène, Kaïs et Dayan partent dans la Sierra Maestra, berceau de la révolution cubaine et retrouver Rosa vieille guérillera à qui nous avions offert une guitare il y a 2 ans.
Michel et Jade souhaitent partir à Holguin grimper les 428 marches qui leur permettront de surplomber la ville et à Media Luna visiter le musée de Celia Sanchez, célèbre révolutionnaire, au pied de la sierra Maestra.
Christophe et Philémon vont rendre visite à Elio, l’ami pêcheur (retraité) de Christophe qui vit à Gibara.
En fin de compte, ces objectifs de départ ne sont que des prétextes pour nous mettre en route, le principal pour nous tous étant de faire des rencontres et de découvrir la vie cubaine…
Objectif rempli ! Vous découvrirez le récit de ces aventures dans notre prochain journal…
En attendant, des bises à tous !
Aude et Moussa (un peu, voir pas du tout).


18 avril 2015

Cuba...

Bonjour à tous,
Le bateau est arrivé à Cuba avant-hier, à la Bahia de Vita pour être plus précis. Le bateau étant amarré dans une marina, tout le monde est parti en randonnée aujourd'hui pour cinq jours.
A bientôt pour d'autres nouvelles...
Kélig

11 avril 2015

la lettre de Kaïs et Michel


Lettre collective Samana à Lupéron

Nous arrivons donc à Samana après trois semaines passées sur le banc d’argent. Les sinus sont lavés, les oreilles aussi et, donc, Samana nous apparaît bruyante, polluée, fatigante. Le soir, les bars déversent une musique super forte qui arrive jusqu’à notre mouillage. Du coup, on a décidé de ne pas traîner. Une équipe courses au supermarché, une autre pour les vivres frais, les autres se relaient pour faire les pleins d’eau avec l’annexe et les bidons. C’est long, surtout quand l’unique tuyau du quai manque de pression. Quelques courses à faire, notamment une nouvelle gaffe  qu’un gaffeur, dont nous tairons le nom par charité (mon premier sert à pécher et mon second est un pronom possessif), a fichu au fond de l’eau. Tout le monde s’y met et en deux jours on a fait ce qu’on avait à faire (sans oublier les lessives). Lorsque Marec et Aude arrivent avec un jour d’avance sur nos prévisions, nous sommes prêts à repartir le lendemain. Ils sont tout blancs, ça tranche avec les pains d’épice du bord. Ils nous apportent des nouvelles, des journaux, des lettres perso et aussi leur enthousiasme. Moment sympa. On repart donc fissa sur le banc. Les fichiers météo récupérés par Michel nous promettent 10 nœuds de vent d’Est. On en aura 20 ! Reste que le vent est bien Est et nous filons retrouver notre Home Sweet Home à bonne vitesse. Comme prévu, nous arrivons un peu tôt à l’entrée du banc et nous nous mettons à la cape le temps que le soleil se lève. On en profite pour prendre le petit-déjeuner à la dérive. Puis, le soleil dans le dos (obligatoire pour voir les patates de corail et pour entrer sur le Banc) nous pénétrons dans le sanctuaire de nos amies les baleines. L’enthousiasme de nos deux nouveaux camarades fait plaisir à voir, surtout celui d’Aude qui n’est jamais venue sur le banc et qui n’a aussi jamais vu de baleines à bosses. Quelques pectorales saluent son arrivée en territoire-baleine. On s’amarre à nos bouées et c’est parti pour une petite semaine de wale-watching et d’éclate.
Bon, on ne va pas vous décrire à nouveau comment ça se passe, si vous ne le savez pas, reportez-vous à la précédente lettre collective qui décrit bien tout ce que l’on voit.
Ce qu’il y a de nouveau cette semaine, c’est que nous avons à bord deux personnes supplémentaires : Aude qui va bientôt remplacer Elodie et notre superviseur, Marec, armé de sa « super vision ». On les met systématiquement prioritaires pour aller sur les ailes (si vous ne voyez pas de quoi il s’agit, révisez les nouvelles données sur le site) et là, forcément, c’est un choc pour nos deux cachets d’aspirine : une baleine à bosses, c’est gros ! Les jeunes commencent à confondre les prénoms d’Elodie et d’Aude ; comme si elles formaient déjà une entité indissociable. Bon, il est vrai que c’est un remplacement très fluide : une bretonne va succéder à une bretonne. Côté gabarit, on fait aussi dans la continuité, au niveau de la joie et de la bonne humeur elles font aussi la paire.
Côté nouveauté, nous avons maintenant à bord un club de « tricoteurs » qui le soir, paisiblement, se tricotent leur bonnet de laine autour de la grande prêtresse des aiguilles : Elodie. Ça donne un petit coté décalé à G.N. « La marine n’est plus ce qu’elle était » semblent se dire certaines vieilles moustaches du bord dont nous tairons le nom par charité (mon premier est très velu et mon second ne l’est pas moins).
Et puis, la présence de Marec permet de faire le point avec les jeunes lors d’un « groupe de paroles ». Ce dernier permettra aux jeunes de dire ce qu’ils ressentent, pensent et ce qu’ils ont envie de dire aux autres. Nos journées sont toujours rythmées par une escapade sur le Banc et par des plongées dans le Polixeny et dans des patates de corail voisines. Peu de rencontres pour cette fin de saison. Les baleines semblent avoir déjà pris le chemin du retour avec leurs petits. Bon, on en verra quelques-unes, mais moins qu’au précédent séjour.
Le 6, c’est l’anniversaire de Kaïs : 14 ans et toutes ses dents ! C’est l’occasion de lui dire qu’on l’aime, et, tant qu’à faire de lui faire quelques cadeaux. Jade, de cuisine, y passera la journée, aidée par toute la meute, pour lui faire des choux à la crème. Bon, c’était une expérience culinaire… intéressante. Le reste de la crème pâtissière finira en pan cake le lendemain matin, c’est dire si la crème était réussie ! On lui offre des dessins, des sculptures sur bois, un réchaud confectionné avec des morceaux de canettes, deux bracelets, un mobile, une serviette, un collier qui pue l’enfer, à base d’éponge de mer (Merci Marec), 7 dollards caribéens à la valeur plutôt affective que financière et deux filets à cheveux de « racaille » américain. Bref, une super soirée avec bougies et tout et tout. Ultime cadeau : une plongée nocturne très attendue par nos jeunes plongeurs. Départ à 1 heure du matin en direction de l’épave du Polixény. Les courageux étaient au nombre de cinq : Christophe , Hélène, Elodie, Philémon et, bien sûr, Kaïs (Michel restera à bord pour les compter à leur retour). La lune était au rendez-vous et l’épave avait quelque chose de féerique, au dire des survivants.
Le 8 au matin, nous récupérons notre mouillage. 6 plongeurs s’y mettent : il faut couper les bidons qui assuraient la flottabilité du mouillage, ramener le bout en textile, défaire les passages de la chaîne entre les patates. Bref, une heure plus tard et, après que nous ayons exploser un grappin qui nous servait à nous maintenir en place durant la manœuvre, nous pouvons quitter une dernière fois le mouillage avec une pensée émue pour l’épave du Polixény  que nous ne pensons pas revoir un jour ; vu son état très enfoncé actuel. Nous partons, comme d’habitude faire du wale-watching et nous sortirons du banc en fin d’après-midi par la passe ouest du banc. Vers 14 heures, un groupe d’une dizaine de baleines adultes nous escortera jusqu’à la sortie. Elles passent et repassent si près du bateau que l’on dirait d’énormes dauphins qui jouent avec notre étrave. Une heure durant, elles resteront à une vingtaine de mètres, voir moins, devant nous, à coté de nous, derrière nous, en nous ! On ne sait plus où donner de la tête, il nous manque juste un troisième œil derrière le crâne pour en profiter. Une des plus belles rencontres depuis que nous sommes sur le banc. En tout cas, la plus belle des rencontres en surface. Nous discutons afin de savoir si elles nous escortaient vraiment pour nous dire adieu, ou bien si c’est juste le hasard. A ce moment-là, se déroulait sous la surface un drôle de dialogue entre les baleines :
- Tu les as vus ?
- Qui ?
- Ces humains sur le voilier.
- Oui, oui
- Tu en as compté combien ?
- Une dizaine au moins
- Oh, toi, il faut toujours que tu en rajoutes !
- Ils avaient l’air sympa, non ? On aurait dit qu’ils nous accompagnaient jusqu’à la sortie…
- Arrête avec tes projections baleinomorphiques !
- N’importe quoi !
- Mais si, tu projettes des sentiments de baleines sur des humains. En fait, ils étaient juste là, par hasard !
- N’empêche, ils avaient vraiment l’air sympa et on aurait bien dit qu’ils nous accompagnaient pour notre départ du banc….

Bref, chez les baleines aussi, on s’est posé des questions. Hélène, chez nous, a réglé la question en disant : « J’men fous pas mal, projection ou pas, moi ça me plaît cette idée qu’elles nous ont accompagnées une bonne partie de l’après-midi, pour nous dire au revoir ! ».

On sort du banc, vers 17 heures, direction Big sand Cay, l’île la plus au sud des Turk and caïcos. Le vent est Est-sud-est et nous décidons de passer par le sud de Mouchoir bank, un plateau corallien sur notre route. Navigation sans problème. Arrivée de nuit vers 4 heures 30, mouillés devant une magnifique plage de sable blanc qui ressortait bien avec une lune encore assez puissante. Quelques brèves heures de sommeil, plus tard, nous entamerons l’exploration de cette île déserte et de ses fonds, plus riches que là d’où nous venons. C’est parti pour la collecte des coquillages en tout genre. Philémon nous ramène un très joli « casque » qui pue l’enfer, parce qu’il y a encore une bestiole dedans. Il faudra, sous la pression de l’équipage, remettre le coquillage à l’eau. D’autres récupèrent un pare battage tout neuf, d’un bleu très chic qui complètera notre collection. Hélène ramènera du corail noir en pagaille. Les coffres se remplissent et Christophe se marre en regardant la tête circonspecte de Michel qui se demande comment tout cela va-t-il rentrer sur G.N.
On lève l’ancre le soir  même, après la soupe, direction Lupéron : 75 milles à faire. Miracle, le vent est bien orienté : 25 nœuds d’Est. Du coup, on file d’un bord, au près bon plein, à 7 nœuds de moyenne, toute la nuit. Nous arriverons au petit matin, à « l’heure où blanchi la campagne », sauf qu’ici la campagne n’est pas blanchie par le givre de la Normandie de Victor Hugo : il fait chaud et nous rentrons dans la mangrove de Lupéron où nous mouillons tout au fond de la baie.
Ainsi, se terminent les aventures de G.N au pays des baleines. Bientôt Cuba, Kaïs s’entraîne à la guitare sur l’air de « commandante Ché Guevarra ». On espère qu’il la jouera assez bien, pour que nous ne finissions pas tous en taule…
 Kaïs et Michel

PS: Une pensée pour Elodie qui rentre en France après un peu plus de 3 mois à bord, c'était super ces trois mois avec toi! On se voit en juillet au retour! (Le claviste).



1 avril 2015

Le Banc d'argent... Acte 2 !!


Nous avons donc dit au revoir à Thierry sur la jetée à Samana puis avons appareillé le lendemain, le 11 mars pour retourner au Banc d’Argent.
Le temps est bien meilleur que la dernière fois et nous sortons tous les jours du mouillage. Le programme des journées est pratiquement toujours le même, nous vous raconterons donc les habitudes que nous avons prises autour de notre routine exceptionnelle de chercheurs de baleines, seuls au milieu de l’océan. Nous ne sommes pas vraiment seuls en fait, mais nous faisons totalement abstraction des bateaux de charter et des pêcheurs qui ratissent le banc. Pour nous, c’est trois semaines tout seuls sur le banc des baleines.

Bien avant le petit déjeuner, les sportifs font leur muscu, les intellos bouquinent et les ronfleurs ronflent. Nous guettons déjà les baleines qui passent parfois tout près du bateau et certains courageux sautent dans leurs palmes pour les rejoindre, au risque même de recracher la dernière bouchée de flocons d’avoine dans leur tuba. Pendant ce temps-là, les moins motivés finissent tranquillement leur café et pointent nonchalamment du doigt pour indiquer aux nageurs où ils doivent aller pour essayer  d’intercepter les baleines qui jouent souvent à cache-cache avec nous.

Ensuite, on fait l’heure de travail de tête quotidienne. De la philo avec Michel, de la nav avec Elo, de l’histoire avec Christophe et du tout et rien avec Hélène qui fait encore semblant de tout comprendre aux cours de physique-chimie des garçons, même si personne n’est dupe.
Ça rassure qui ?
Anaëlle est d’intendance, alors elle surveille l’inexorable pourrissement des fruits et légumes et donne aux cuistots les denrées qui doivent être passées le jour même. « t’es sûre ? de la betterave molle et puante dans ma quiche lorraine ?  je préfère la laisser à Christophe, il aime bien les faire, lui »

Une nouvelle routine s’est mise en place le matin : c’est pomper l’huile qui a fui du moteur tribord et la remettre dans le réservoir. Eh oui, le moteur a attendu que nous soyons loin de tout pour nous faire sa crise de mi-voyage. Nous n’avons pas la pièce qu’il nous faut, alors en attendant de rentrer à Samana, nous bidouillons une solution : on s’assure juste qu’il y ait assez d’huile dans le moteur pour une utilisation en urgence, ce qui bien sûr, n’arrivera pas. Les manœuvres quotidiennes se font donc avec le moteur bâbord uniquement.

Vers 9h30, on appareille. On a défini qui sera de manœuvre, qui sera de veille, qui va plonger en premier, qui tiendra le cahier de rencontres (cahier où l’on note la description, l’heure et la position des rencontres avec les baleines, ce qui nous sert à reclasser ensuite les données et les photos) etc…au fur et à mesure que les jours passent, cette opération prend de moins en moins de temps et les manœuvres sont de plus en plus belles. Oh, bien sûr, on arrive parfois un peu vite sur le mouillage et on dépasse un peu sur la patate de corail, et puis, aussi, on perd la gaffe par 20 mètres de fond…on pense alors à demander à Kaïs, le petit-fils de l’Homme de l’Atlantide de plonger pour la récupérer puis on se ravise, des fois qu’il nous refasse un syncope en se forçant a descendre trop profond. Qu’à cela ne tienne, une pagaie fera l’affaire, ça va bien avec notre style de hippies des mers.

Revenons à notre routine. Nous guettons les baleines et avons régulièrement la chance de les approcher. Parfois furtivement, parfois de longues minutes et l’on ne peut que se dire « wow ! il s’est vraiment passé quelque chose, là ! t’as vu son œil ? t’as vu quand elle nous a regardés ? » ce sont souvent des mères avec leur petit pour les rencontres sous marines, en palmes, masque et tuba, toujours surveillés par l’escorte. Pour les spectacles en surface, les sauts et les pirouettes, il faut suivre les groupes de mâles compétitifs qui courtisent une femelle. Et à chaque fois on s’émerveille de tant de grâce et de puissance.
On s’amuse à envoyer Philémon sur des baleines qui sont encore à un mille de distance puis on le suit au moteur et on le récupère quand il commence à faiblir et que les baleines n’ont même pas remarqué qu’on s’approchait à 0.5 nœud !
On s’amuse aussi à recommander à Dayan de mettre plutôt tel short que tel autre, surtout avec le paréo , que ce sera mieux pour lui, puis on change d’avis, puis on se ravise, surtout qu’il a un chapeau, puis non…enfin, quand on arrive à proximité des baleines et qu’il faut s’équiper rapidement, on l’écoute gémir parce qu’il a le mauvais attirail sur les fesses et qu’il manque de tomber en essayant de se changer au plus vite…les baleines se marrent et se barrent.

Quand il y a trop peu de vent, on n’avance pas assez vite pour plonger avec les ailes derrière le bateau , alors on invente toutes sortes de figures acrobatiques en écoutant les baleines chanter sous l’eau.
La pause déjeuner se fait à la dérive et c’est aussi l’occasion d’apprendre à faire le point astro- quelques pirouettes par-dessus bord pour se rafraichir et on hisse à nouveau la voile et on repart à la poursuite d’un souffle à l’horizon.

Une fois rentrés au mouillage, on part explorer l’épave si on a le temps puis on revient goûter à bord et écouter l’histoire collective. La plupart d’entre nous raffolent de cette specialité locale appelée flan de leche que l’on mange à même la boîte, en raclant le fond avec le doigt. Les plus gourmands se reconnaissent à la méchante coupure entre les deux phalanges.
On vaque à des occupations presque calmes en attendant le coucher du soleil et son mythique rayon vert (si, si, nous l’avons vu) yoga, échecs, lecture, guitare.

Le dîner à la belle étoile est propice à de bonnes conversations. Parfois Michel donne le ton en posant une question philosophique, mais parfois les sujets dérivent :
« que penses-tu de la séparation des cuillers à café des cuillers à soupe dans le casier à couverts ? » « si la lune est pleine à midi au pole nord, pourquoi n’est-elle pas noire au pole sud ? » « si le caleçon de Moussa a touché le corail de feu un lundi, ses fesses le gratteront-t-elles encore vendredi ? et si oui développez »

En parlant de Moussa, nous avons fêté ses 15 ans le 18 mars. Tous ses cadeaux avaient un thème récurrent : les baleines ! (sauf le caleçon). Kaïs lui a confectionné une tarte au citron exceptionnelle et les bougies étaient tellement petites qu’il a fallu les rallumer pour la photo, ce qui a rendu Kaïs hystérique car sa meringue allait retomber.

La météo au banc d’argent est particulière, très différente de tous les autres endroits du monde.
On distingue trois facteurs déterminants :
-        La pression atmosphérique, qui ne détermine rien du tout.
-        La couverture nuageuse, qui n’apporte pas beaucoup plus de précisions
-        La présence de Kaïs et Dayan sur les filets pour dormir, qui annonce à coup sûr de la pluie pendant la nuit.

Sur la fin du séjour, le temps a tourné. Plutôt difficile d’aller voir les baleines avec 20noeuds de vent et de la houle à faire couler ceux qui auraient l’idée d’aller à l’aile.
Michel en profite pour instaurer un atelier « je construis moi-même mon engin explosif à bord ». Avec une canette vide et (dieu merci nous n’en n’avons pas) de l’alcool à brûler, il apprend aux jeunes à fabriquer un réchaud pour le camping. Activité édifiante qui occupe sagement les enfants pendant une bonne partie de l’après-midi et les grands le reste de la journée à ramasser tout d’abord les débris d’aluminium disséminés un peu partout entre la cale et le plafond tribord et ensuite ceux qui se sont logés dans les doigts des bricoleurs du dimanche.
Autre atelier survie proposé par le capitaine : manœuvre d’homme à la mer par 20 nœuds de vent et 1m50 de creux. Il s’agit donc de balancer 2 personnes (une c’est trop dangereux) et un gros pare-battage par-dessus bord. On leur fait signe en les abandonnant au milieu de l’océan ; on leur fait signe aussi alors qu’on passe à côté mais trop loin pour les sauver. On leur hurle dessus en faisant de grands gestes lorsqu’on s’est approchés trop vite et qu’on manque de les noyer en leur passant dessus. Quand on arrive enfin à les hisser saines et presque sauves à bord, on décide alors de leur faire un dernier signe et de les repousser par-dessus bord parce qu’il faut améliorer la performance.
On veillera juste à ne pas les rejoindre dans l’eau en se prenant une vague ou une voile sur la tête pendant qu’on est occupés à les pointer du doigt. Une fois les cobayes quasi mortes de froid, on décide de rentrer et on s’exerce alors à une activité tout aussi sportive et presque pas dangereuse : récupérer la bouée du mouillage avec un seul moteur, pas de gaffe, les fameux 20 nœuds de vent contre nous et les patates de corail qu’on n’avait jamais vues d’aussi près. Ceux qui avaient raté la muscu du matin viennent de rattraper des points !
Rassurez-vous, on sait aussi s’occuper les jours de grand vent en faisant des choses plus calmes comme les cours de théâtre d’impro organisés par Elo et Anaëlle -bien que certains, il semble, préfèreraient mourir noyés que de se prêter au jeu- mais il faut bien faire son effort communautaire, hein Hélène ?

Heureusement ; l’activité principale étant la rencontre avec les baleines, nous n’avons pas trop le temps d’élaborer des passe-temps plus douteux que ceux déjà en place. Tout le monde a eu le bonheur, parfois répété, de nager tout près de baleines bienveillantes et curieuses et même si la vie du groupe inclut forcément des conflits et des tensions, une bonne rencontre remet souvent tout le monde d’accord : les baleines, c’est un moment incroyable du voyage, à peine racontable, et nous avons le privilège de le vivre pleinement.
Nous sommes à présent sur le point de rentrer à Samana pour accueillir Aude et Marec et partager avec eux un peu de notre vie sur le Banc d’Argent.

Hélène et Anaëlle